Problématique des personnes concernées

Note de cadrage « Autisme et autres TED : les interventions et le projet personnalisé chez l’adulte. » HAS,  ANESM.

Dans le cadre des troubles envahissants du développement (TED), la classification internationale des maladies (CIM-10) est la classification de référence. L’autisme infantile est l’une des huit catégories de TED identifiées dans la CIM-10. Les formulations diagnostiques de la CIM-10 relatives aux TED s’appliquent à tous les âges de la vie.

Les TED regroupent des situations cliniques diverses, entraînant des situations de handicap hétérogènes. Parallèlement à la classification internationale des maladies, la classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF) permet de décrire le fonctionnement humain par « fonctions organiques », «structures anatomiques», « activités et participation de la personne dans la vie réelle » et les restrictions qu’il peut subir. Dans le cadre des TED, la CIF permet de décrire les particularités de fonctionnement de ces personnes, en particulier les fonctions mentales concernées, les limitations d'activité observées et les restrictions de participation de la personne dans son environnement.

Au niveau national, le handicap est défini, dans la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Son article 2 énonce que « constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant » (loi n° 2005-102 du 11 février 2005). Le handicap désigne alors les conséquences sociales de la maladie.

Le diagnostic initial d’autisme infantile reste stable pendant toute la vie dans 80 à 82 % des situations étudiées. Cependant, les symptômes de l’autisme, en particulier ceux de la triade autistique (troubles de la communication et du langage, des interactions sociales et les comportements stéréotypés répétitifs) peuvent se modifier au cours de la vie.

Les points suivants font l’objet d’un consensus :

  • La communication non verbale et le langage peuvent s’améliorer pendant la trajectoire de vie entière ;
  • Les troubles des interactions sociales sont l’élément le plus persistant de la triade autistique au cours de la vie ;
  • Les comportements répétitifs et stéréotypés peuvent diminuer à l’âge adulte, mais pas de façon très importante.

Les facteurs qui déterminent l’évolution des symptômes de la triade autistique sont nombreux et interagissent entre eux. Les principaux facteurs prédictifs de l’évolution sont :

  • Les conditions d’apparition des troubles et leur précocité ;
  • L’intensité de la symptomatologie ;
  • La présence de troubles associés (retard mental, troubles médicaux) ;
  • Les facteurs environnementaux (mode d’accompagnement et de suivi).

Les particularités sensorielles semblent se retrouver chez une majorité d’adultes avec TED. Elles peuvent toucher une ou plusieurs sphères sensorielles. Elles s’expriment par des hyper ou des hypo-sensibilités qui varient selon les personnes et les modalités perceptives. Elles peuvent engendrer des comportements dans lesquels les réponses de la personne paraissent inadaptées.

D’après la CIM10, l’autisme et les autres troubles envahissants du développement sont caractérisés par des perturbations qualitatives, des interactions sociales réciproques et des modalités de communication, ainsi que par un répertoire d’intérêts et d’activités restreint, stéréotypé et répétitif. Au-delà de la nosographie utile au diagnostic, il est possible de s’accorder sur un certain nombre de particularités constatées chez les personnes avec autisme ou autres TED. Il est important de rappeler la grande hétérogénéité des profils au regard de l’intensité des troubles, de la présence éventuelle d’une déficience intellectuelle et de son degré, des troubles sensoriels, ainsi que des pathologies associées. En outre, il faut souligner que chaque personne est singulière et que ses caractéristiques varient selon les moments de sa vie.

Les quelques éléments indiqués ci-dessous ne se retrouvent donc pas systématiquement chez un même individu. Ils sont donnés à titre d’exemple et ne sont ni hiérarchisés, ni exhaustifs :

  • difficulté à percevoir et à comprendre les intentions et les émotions d’autrui ainsi qu’à exprimer les siennes ;
  • difficulté dans la perception et la reconnaissance des visages, ainsi que des mimiques faciales ;
  • expressions du visage inappropriées de sa part, difficulté à anticiper, à prévoir les événements et à planifier ;
  • centres d’intérêts particuliers et compétences exceptionnelles ;
  • acquisitions non spontanées, nécessitant des apprentissages spécifiques ;
  • particularités dans le traitement de l’information sensorielle (hypo ou hypersensibilité), dans l’expression de la douleur ;
  • particularités dans la perception et la discrimination perceptive (domaines auditif, visuel, tactile) ;
  • des résistances alimentaires qu’il est important de prendre en compte lors des repas ;
  • résistance au changement dans l’environnement.

Il est important de ne pas oublier les problèmes médicaux associés : épilepsie, troubles du sommeil, de l’alimentation, angoisse, dépression…

Des difficultés constatées chez les personnes accueillies à ALBATROS 08

Les difficultés des personnes concernées par ce projet peuvent être de trois ordres :

  • Des difficultés liées à leur(s) problématique(s) ;
  • Des difficultés liées à l’environnement ;
  • Des difficultés liées aux interactions entre les personnes et l’environnement.

Des difficultés liées à leur(s) problématique(s) personnelle(s)

  • Incompatibilité entre la problématique des personnes et le principe d’activité : difficultés à mobiliser les compétences, à investir des activités, à s’inscrire dans un fonctionnement de groupe ;
  • Difficultés  à vivre en collectivité : à s’adapter, à accepter les contraintes, les frustrations, les modifications constantes de l’environnement, les imprévus, les changements, le partage des lieux, le partage des accompagnateurs… ;
  • Nécessité d’une vigilance permanente et d’un accompagnement individuel : les personnes ne savent pas exprimer verbalement la douleur, elles ont besoin d’une observation fine d’éventuelle(s) modification(s) dans leur comportement ;
  • Impossibilité d’exprimer verbalement ses difficultés et son mal être : les personnes développent des troubles qui se manifestent par de l’auto-ou de l’hétéro- agressivité, de l’errance, de la fuite…

 Des difficultés liées à l’environnement :

  • Différents lieux de vie : difficultés à gérer les transitions, à passer d’un lieu à l’autre, de l’hébergement aux ateliers, des ateliers au restaurant …
  • Des intervenants multiples : impossibilité de s’adapter aux éducateurs des hébergements, puis à celui de l’atelier, puis à celui qui accompagne le repas, puis à l’éducateur du deuxième atelier …
  • Une organisation (faite de rupture et de transitions) rythmée : pour des personnes qui ont des difficultés à gérer les temps de pause, les transitions, les moments de flou, les moments non structurés, les moments « libres » ;
  • Des espaces collectifs : difficilement compatibles avec la nécessité pour ces personnes d’évoluer dans un espace clos, privé, contenant, sécurisant et sécurisé.

 Des difficultés liées aux interactions entre les personnes et l’environnement

  • Un environnement en perpétuel mouvement : changement de salle, changement d’éducateur, modifications visuelles de l’environnement liées à la vie collective, modification de l’espace concret en lien avec de nouvelles créations artistiques, modification des groupes, des accompagnateurs, de la disposition des tables… liées à la dynamique institutionnelle alors que ces personnes qui n’ont pas accès au sens ont besoin  de repères stables et recherchent l’immuabilité ;
  • Une volonté institutionnelle de proposer un espace de liberté dans un cadre fixé : les autres résidants vont et viennent, perturbant l’immuabilité qui leur est nécessaire (portes ouvertes, sorties, choix de changer d’activité…) ;
  • Une stigmatisation des personnes : ces personnes développent des troubles qui les stigmatisent  et insécurisent les autres résidants et certains professionnels.

Les besoins repérés de ces personnes

Par rapport aux personnes elles-mêmes :

  • Besoin d’être accompagné de manière individuelle et adaptée en fonction des intérêts, du rythme de chacun, pour répondre à ses besoins vitaux ;
  • Besoin de pouvoir s’apaiser dans les moments d’envahissement émotionnel ;
  • Besoin de repères fixes et constants (mêmes lieux, même équipe d’accompagnants) ;
  • Besoin d’être accompagné et reconnu avec son rythme et son état  émotionnel.

Par rapport à l’environnement :

  • Besoin d’un espace sécurisé et protégé des stimuli extérieurs ;
  • Besoin d’un espace privatif identifié (chambre individuelle) et d’espaces communs adaptés, spécifiques et sécurisés ;
  • Besoin de pouvoir utiliser sa chambre selon ses besoins ou envies (loisirs indépendants, refuge, repos…) ;
  • Besoin d’un espace pour l’accueil des familles.

 Par rapport aux interactions :

  • Besoin d’évoluer au sein d’un petit groupe,
  • Besoin d’être accompagné de manière individuelle pour pouvoir rester en contact  avec le monde extérieur,
  • Besoin d’avoir une équipe professionnelle stable, formée et compétente, qui soit en capacité de traduire les troubles exprimés en terme de difficultés et de besoins.